Paroles d’adoptés
Spécifions d’abord qu’ ALPA existe sous la forme d’asbl depuis 2012. Depuis cette date, ALPA reçoit quelques fonds de l’Autorité Centrale Communautaire en répondant à ses appels à projets. Si cela permet à l’asbl d’avoir une légitimité à travailler dans le secteur, cela ne lui permet pas de se développer comme elle le souhaiterait ni comme son public en aurait besoin.
ALPA offre un service pour personnes adoptées, adoptantes et professionnelles. Ainsi, des personnes concernées directement et indirectement par l’adoption peuvent se rencontrer dans les groupes qu’elle propose. Nous vous invitons à visiter son site (www.alpa-asbl.be) pour plus de renseignements. Malgré de maigres subventions, des volontaires se mobilisent pour mettre des actions sur pied, dont celle-ci : « Paroles d’adoptés ». Cette activité est dédiée à faire entendre la voix des adoptés et à formaliser un texte qui reflète, d’une voix, ce dont les adoptés ont besoin. ALPA a plusieurs missions dont celle qui consiste à jouer le rôle d’interface vis-à-vis des autorités, de porte-voix pour son public.
Nous demandons donc à l’asbl de porter cette lettre à la connaissance des autorités, de faire entendre la voix des adoptés à l’attention du Conseil Supérieur de l’Adoption (COSA) et des autorités compétentes de l’aide à la jeunesse et de l’adoption.
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« Merci de nous avoir sauvés »… Sauvés de quoi au final ?… Doit-on remercier sans cesse ? Le temps a passé et nous avons construit nos propres bases identitaires et nous méritons reconnaissance concernant la difficulté que constitue le bouleversement généré par l’adoption… C’est pourquoi nous souhaitons interpeller les autorités compétentes sur la nécessité de mettre sur pied un service post-adoptif structurel dans les textes. … Ces structures doivent recevoir un cadre légal pour professer, ainsi que l’argent y afférent.
Sur base du Mentimeter en annexe, nous avons pu échanger entre nous (personnes adoptées) sur notre vécu commun. Il est frappant de voir comment nous pouvons nous ressembler dans nos fonctionnements. « Il n’y a pas de hasard… Il y a des rendez-vous»… Merci ALPA, Merci Tsela, Merci Lidia de nous avoir réunis.
Nous percevons que le MOI d’hier n’est pas le MOI d’aujourd’hui, ni celui de demain… Nous nous construisons au quotidien.. Nous ne sommes plus des enfants adoptés mais bien des personnes qui ont été adoptées. Devenus adultes, nous souhaitons être entendus dans nos besoins.
Notre confiance en nous a évolué… C’est pourquoi nous sommes ici ce soir. Aujourd’hui, notre rapport à notre histoire est différent d’hier ou encore de demain.
Notre vécu d’adoption impacte notre façon d’être en relation intime ou non… Mais notre résilience est aussi notre force… Une envie de vivre qui a parfois été mise à l’épreuve mais aujourd’hui… nous sommes ici. Parler de nos origines n’est pas toujours simple pour chacun de nous mais nous sommes parfois amenés à le faire… Cette question concerne aussi des personnes adoptées en interne. Même si aucun enfant ne demande à être « là », en adoption, nous revendiquons notre droit à savoir ce qu’on fait là… Quel est le projet de l’état pour nous ? Notre droit à connaître nos origines sans avoir des embûches pour y arriver est un minimum.
C’est quoi avoir de la chance ?… Nos parents aussi ont de la chance qu’on soit là. Nous ne devons pas être redevables de cette condition toute notre vie… Nous voulons avoir le droit de faire notre puzzle et de trouver les pièces… Nous devons aussi, bien souvent, accepter les pièces manquantes. Nous repérons aussi qu’il existe un conflit d’intérêt entre les OAA qui, à notre sens, travaillent plus les intérêts des adoptants que l’intérêt des « enfants » en conservant nos dossiers… Où sont les notions de l’aide à la jeunesse ? Il est essentiel de soutenir des structures qui sont plus indépendantes.
C’est quoi un suivi ? Ne faudrait-il pas donner aux parents la possibilité de suivre une « formation » continue sur l’attachement ?… Pour la personne adoptée, le suivi doit intégrer l’idée que « faire famille, ce n’est pas simple ».
Des tabous nous hantent… La honte s’immisce dans nos vécus… Qui sommes-nous ?,… Des clandestins légaux ? Quel paradoxe ! Bien souvent, nous portons des aspects transgénérationnels en plus de notre vécu et nous n’arrivons pas toujours à faire la part des choses entre ce qui est de nous ou non !
Nous voulons nos origines. Nous ne voulons plus devoir faire des « courbettes » pour avoir accès à nos origines ou à un soutien post adoptif. En tant que Belges, adoptés par l’état belge, nous demandons d’être entendus en tant que tels et pris au sérieux. Nous n’accepterons plus d’être infantiliser et demandons le droit de parole qui nous est dû.
Bien à vous.
Quatorze adoptés
issus de l’adoption interne et internationale
entre 20 et 70 ans
présents en Belgique